
Ce texte accompagne l'album photos Paysages fuyants. (Voir)
On ne sait plus où s’arrêtent les corps. On avance en nageant parmi les formes ouvertes, ou bien on reste immobile débordé par leur course.
Ni équilibre ni déséquilibre, la superposition de deux états attrapés par la vitesse.
Les formes se superposent avec un léger décalage, entrent en résonance.
On change d’être. Entre le déjà et le pas encore.
Sans accomplissement. L’instabilité fait disparaître le temps.
La fenêtre du train est un cadre que le paysage déborde, il s’y précipite et en sort à toute vitesse, déporté, retenu par un fil, distendu glisse déjà hors prise, fondu, évanoui loin en arrière.
Apparitions dévorantes. Le hors champ bouscule le cadre. Dans le champ surgit la fuite.
Les couleurs giclent, dématérialisées.
Le regard s’affole.
La lumière est une onde. Ce jour qui ruisselle s’abreuve à la nuit.
À contre-jour un arbre s’illimite.
Plus de blancs. Le cœur s’emballe sans syncopes. Venir. Aller, des passages presque invisibles.
Surviennent par vagues. Se défont sans dénouement.
Ce qui arrime le réel a lâché, il sort du regard, s’engouffre dans la ligne de fuite.
L’espace n’a plus le temps de respirer. Se rétrécit vers l’inconnu.
Voir de biais, voir sans fixer. À perte de vue.
Sans contact. Sans accommodation.
Ne consent jamais.
Être en train de mourir, de revenir, dans ce battement.
(Octobre 2029-août 2024)